Mao

MALRAUX A VOULU VOIR MAO




André Malraux avait une admiration de midinette pour les gens célèbres. François Mitterrand, dans une chronique du 6 mars 1972, à propos d’une émission de télévision avec Claude Santelli, commente : Malraux s'y promène en la compagnie familière de Robespierre et de Gandhi, de Lénine et de saint Bernard, de Michelet et d'Alexandre le Grand, sans oublier, bien entendu, le subtil empereur de bronze. Cette dernière image désigne à trois reprises Mao Tsé-toung dans le compte-rendu figurant dans les Antimémoires de l’entretien que celui-ci lui a accordé à Pékin le 3 août 1965. Ce compte-rendu et les compte-rendus officiels sont analysés en détail par Jacques Andrieu (1949- , sinologue chercheur au CNRS) dans un article de Perspectives chinoises n° 37 de 1996, pp. 50-63, titré Mais que se sont donc dit Mao et Malraux ? La critique est féroce :

Malraux tente de se faire reconnaître comme un homme de lettres, un familier des grands de ce monde, le porte-parole du général de Gaulle et un personnage important de l’histoire mondiale.

il n’était pas facile à un personnage qui était un ministre du général de Gaulle et un écrivain reconnu d’avouer à son public que son entretien avec « le plus grand révolutionnaire de notre époque après Lénine » avait été un four complet et qu’il y avait tenu le mauvais rôle, celui du courtisan maladroit platement éconduit par son interlocuteur.

Par ailleurs, M. Andrieu ne manque pas de faire remarquer l’indécence d’ignorer le bilan catastrophique du Grand bond en avant (1959-1961), épisode qui vient de s’achever : plusieurs dizaines de millions de morts dans « la plus grande famine jamais enregistrée dans les annales de l’humanité. »

C’est que Malraux, hélas, a admiré les plus grands assassins de l’Histoire.


T’as voulu voir Napo

Napoléon-Hitler

Le 28 juin 1940, à Paris, Hitler a mis son beau costume blanc pour honorer l'Empereur aux Invalides



Une des autres admirations d’André Malraux a été Napoléon Bonaparte. Il aurait compilé et sélectionné certains de ses textes pour les publier chez Gallimard en 1930 sous le titre Vie de Napoléon […] par lui-même, sans mention de son nom, qui n’est apparu que pour la réédition en 1991. « Malraux plus Napoléon, comment le succès ne serait-il pas assuré ? » commente Jean Tulard dans un article de 1992 dans la revue Commentaire (vol. 15 , n° 57, pp. 248-249) à l’occasion de cette édition et titré Napoléon vu par Malraux ou Malraux vu par Napoléon ? Tulard met en garde :

Prévenons le lecteur : il n'y a pas une ligne de Malraux dans cet ouvrage et en guise de « vie de Napoon » on ne trouve qu'un montage de lettres et de documents divers dont il n'est pas certain que Malraux ait présidé au choix.

Il reste que l’admiration de Malraux pour l’Empereur des Français est évidente et se manifeste ici ou là, le plus souvent par des anecdotes, ineptes et sans intérêt. En voici un exemple avec celle racontée devant Mao, selon les Antimémoires, avec le commentaire de Jacques Andrieu :

. Malraux fait de nombreuses analogies transhistoriques et interpersonnelles, qui sont, il faut bien l'avouer, assez ampoulées. A propos de la Longue Marche, il écrit :

"Je me souviens de Napoléon pendant la retraite de Russie :

Sire, nos hommes sont massacrés par deux batteries russes.

Qu'on ordonne à un escadron de les prendre! "


Si vous parlez de Napoléon, ne craignez pas de vous voir attribuer des points Godwin, car sans aucun doute l’analogie avec le Führer est pertinente, par exemple pour Roger Caratini (Napoléon une imposture, l’Archipel, 2002, p. 14) :

Alors que reste-t-il du personnage? Un guerrier qui a gagné ses batailles et perdu ses guerres, un dictateur qui a tenté d'imposer sa dictature, par les armes, à toute l'Europe, ce que seul Hitler a tenté de faire, dans l'histoire de ce continent, et non pas l'idéal de la Révolution, comme il s'en vantera à Sainte-Hélène. Et, comme Hitler, Napoléon a échoué. Il a été l'homme qui a failli perdre la France.


En cette période de déboulonnage (au sens propre) de statues, où celle Joséphine a été abattue de son socle place de La Savane à Fort-de-France, et où celle, équestre, de son mari l’Empereur sera peut-être remplacée à Rouen par celle d’une femme comme l’envisage la municipalité (le maire propose Gisèle Halimi), une Bastille reste à prendre, c’est le Panthéon, où figurent des personnages inappropriés. Sait-on que s’y tient là quelqu’un qui a écrit : « ... je vois des hommes qui me paraissent supérieurs à ces nègres, comme ces nègres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux huîtres et aux autres animaux de cette espèce... » On sait qu’il est possible d’être exclu du Panthéon (voir Div Mirabeau). Gageons qu’un jour une révision des conditions dans lesquelles ont eu lieu certaines admissions sera effectuée.


© Jacques Haussy, septembre 2020


A peine cette information sur la statue de Napoléon de Rouen a-t-elle buzzé qu'un Kéké de Paka s'est précipité :


Estrosi-Napoléon

C'est quoi un "Kéké de Paka" ? Pas de définition. Tartarin, le héros de Daudet, en est un bien sûr. C'était d'ailleurs l'ancienne dénomination du kéké : "un tartarin". Aujourd'hui on dit "un kéké" et Renaud Muselier, Christophe Castaner...  en sont d'autres typiques. Y a-t-il des femmes parmi ces kékés ? Oui, bien que le terme soit genré, elles sont "Kékés de Paka d'Honneur".  Nadine Morano par exemple, quoique Lorraine, en serait un.

octobre 2020