LE MONDE ET MALRAUX 3, article Orwell, au cœur de l’inhumanité, par Philippe DAGEN, 4 juillet 2003

 

 

Le 25 juin dernier était célébré le centième anniversaire de la naissance de l’anglais George Orwell, l’un des plus grands écrivains et journalistes politiques du XXème siècle. A part quelques journaux, dont Le nouvel Observateur du 29 mai, la presse française a fait le service minimum, certains reprenant même la calomnie d’un Orwell dénonciateur de communistes auprès du ministère des affaires étrangères britannique. Ainsi de Libération qui titre (26 juin) : « George Orwell était-il une balance ? » La falsification a pourtant déjà été démontée et dénoncée dans une brochure éditée par les éditions de L’Encyclopédie des Nuisances et Ivréa (George Orwell devant ses calomniateurs, 1997. A remarquer un extrait de ce texte publié par les responsables respectifs de ces maisons d’édition, Jaime Semprun et Lorenzo Valentin : « Autant que par ceux qu’elle diffame, une époque se juge par ceux qu’elle honore, et par la manière dont elle les honore. On a ainsi vu récemment, à l’occasion de sa panthéonisation, l’escroc Malraux loué par tous les modernes, non quoique imposteur, mais justement parce que imposteur. Tout est bien fait pour leur plaire dans une carrière où le talent à rebondir d’un bluff à l’autre n’a en tous cas jamais fait défaut… quant à la trajectoire de l’esbroufeur, à travers ces années où s’effondraient définitivement la stabilité et les valeurs de la société bourgeoise, et où soutenir une telle carrière demandait au moins une réelle constance dans l’arrivisme, elle demeure un modèle, une source d’inspiration, un type idéal inaccessible à ces intellectuels dont le plan de carrière n’excède pas le cycle d’usure, toujours plus court, de la camelote culturelle qu’ils sont employés à produire. C’est donc surtout à l’absence de scrupules qu’ils rendent hommage en reconnaissant en Malraux un précurseur. » Cette clé de compréhension de l’attitude d’admirateurs de Malraux est à retenir).

 

Dans Le Monde, l’hommage est confié à Philippe Dagen, que l’on n’attendait pas dans cet exercice, mais qui, en opportuniste patenté (voir Dagen sur ce site), s’en tire honorablement. On lit même, avec surprise compte tenu de l’admiration que voue Dagen aux écrits sur l’art de Malraux : « Un écrivain politique est un écrivain qui a le plus grand souci du mot juste, se méfie des grands effets et ne se prend ni pour un héros ni pour un prophète. Il s’assigne des buts modestes et inaccessibles, tels que montrer le monde tel qu’il est et se donner une langue précise et claire qui puisse aussi bien décrire l’ameublement d’une salle à manger que l’état d’esprit d’un commissaire politique, un refuge pour mendiants dans la banlieue de Londres que la nature en Birmanie. Et cela en s’en tenant au nécessaire, sans aucune concession au lyrisme ni à la métaphysique - ce dont on déduira qu’Orwell est un anti-Malraux. » Bien vu !

 

 

© Jacques Haussy, juillet 2003